Chacun comprend que les éditeurs de logiciels ne soient pas frappés par la pandémie mondiale au même titre que d’autres pans de notre économie : la crise sanitaire a accéléré le processus de digitalisation des échanges et des modes de production qui était déjà fortement engagé. Ce processus se traduit dans leurs résultats. J’ajoute immédiatement que ce constat ne doit en aucun cas être compris comme une fatalité à l’égard des secteurs qui ne sont pas dématérialisés à ce point : le Président de la République et le Gouvernement ont déployé les ressources adaptée à chaque secteur, chaque entreprise et autant que possible chaque situation particulière.
Je veux saluer les performances des éditeurs français de logiciel dans ce contexte difficile. Evidemment leur développement doit être rapporté à leurs efforts et à leur capacité à anticiper les grandes ruptures technologiques qui sont plus fréquentes et plus nettes dans le numérique que toute autre industrie. Je note avec intérêt qu’ils sont une majorité à envisager le renforcement de leurs investissements en recherche et de leur déploiement international. Cette démarche volontariste de croissance est porteuse d’espoir pour le logiciel français : nous sommes à l’aube d’un grand effort de relance économique, privée comme publique partout dans le monde. Il est crucial qu’un secteur économique aussi stratégique pour la France que les logiciels soit en phase avec le grand renouveau économique qui se prépare.
Pour accompagner les logiciels français dans la relance à venir, le Plan de Relance piloté par Bruno Le Maire consacre des stratégies d’investissements spécifiques comme la Stratégie d’Accélération Cybersécurité, annoncée en février 2021 par le Président de la république, qui oriente 1,4 milliards d’euros à la meilleure protection cyber de nos concitoyens, collectivités et de nos entreprises. Il en va de même pour la stratégie nationale pour le Cloud annoncée par le Gouvernement le 17 mai 2021 et qui montre toute l’importance d’une gestion souveraine des données des français. D’autres actions qui concernent directement des éditeurs de logiciels seront annoncées dans les mois à venir notamment de l’Intelligence Artificielle.
Cet accompagnement est important car la bonne santé des logiciels français est porteuse d’une double bonne nouvelle. D’abord parce que l’efficacité et la productivité qu’ils font gagner aux entreprises qui les utilisent ont très vite un effet démultiplié sur l’économie tout entière. Les investissements réalisés dans le logiciel sont, de ce fait, un indicateur avancé de la reprise future. Ensuite parce que la digitalisation va de pair avec une utilisation plus fine et plus économe des ressources naturelles : une entreprise plus digitalisée a un modèle de croissance moins dispendieux et plus durable, plus respectueux de son empreinte locale tout comme de son impact global.
Enfin, je sais que les éditeurs de logiciels prévoient d’accélérer leur programme d’embauche et je les exhorte à ne laisser personne au bord du chemin et à s’assurer que les plus jeunes et les plus fragiles soient au cœur de leurs préoccupations. Plus que jamais, surtout dans les secteurs qui ont le mieux résisté à la crise, nous demandons aux entreprises une attention accrue aux difficultés de nos concitoyens. Je suis convaincu que les fleurons français de la dématérialisation et de l’intelligence artificielle se montreront à la hauteur de ces enjeux cruciaux.
Cédric O, Secrétaire d’État chargé de la Transition numérique et des Communications électroniques
Éditorial - Bernard-Louis ROQUES
Le logiciel français investit dans la recherche ; promesse d’une reprise économique générale ?
En 2021, le secteur des éditeurs de logiciels a très bien tenu face à la crise. Mais il pourrait pâtir des bouleversements macroéconomiques si rien n’est fait pour orienter le surplus d’épargne, et pour répondre à la demande des entreprises pour une plus grande flexibilité du marché du travail.
En 2021, le marché Français de l’édition de logiciels reste solide et emploie 165 000 personnes dont 28 000 en R&D. Avec une croissance de 6,6% et un taux de profitabilité proche de 10%, il démontre une fois de plus son dynamisme.
Même en y regardant à la loupe, les traces de la crise sont difficilement discernables à l’échelle de chaque entreprise. En cause, la montée en puissance de l’abonnement dans les modes de contractualisation associés au SaaS, qui a participé à amortir les effets du choc.
Cependant, au niveau macroéconomique, la crise a bouleversé certains équilibres. La conjonction de l’accumulation de l’épargne des Français pendant la crise, et de la diminution des rendements des placements « classiques » provoque une réorientation de l’épargne vers le financement des entreprises nationales. Cette dynamique est une excellente nouvelle ! Notamment pour les secteurs comme celui des éditeurs de logiciels qui souffrent du manque d’appétit chronique du marché financier national.
Pour financer la reprise, cette épargne doit être orientée vers les secteurs où la concurrence est globale, dans un contexte où l’activité des fusions acquisitions bat son plein, et face à des entreprises américaines et chinoises aux valorisations bien supérieures. Bien que la bataille se joue au niveau international, c’est au niveau local qu’on verra ses effets.
Dans une période où la réactivité et la maîtrise du savoir-faire s’imposaient, l’industrie française du logiciel a joué son rôle et créé des emplois localement. Pour 69% des cas, le secteur n’a pas eu recours au PGE durant la pandémie, performance rare dans le contexte exceptionnel que nous traversons. Toutefois, si ces entreprises apprécient le plan de relance, réponse conjoncturelle à la crise, elles souhaitent surtout des changements structurels, en particulier une plus grande flexibilité sur le marché du travail afin d’embaucher.
Ainsi, c’est avec confiance que les pouvoirs publics pourraient aider le secteur de l’édition de logiciel. C’est une force de la France, c’est une industrie où la France a un rayonnement mondial, et c’est un secteur responsable, fortement engagé dans l’accompagnement des changements environnementaux. C’est surtout un messager de la croissance future : les éditeurs de logiciels sont, pour leurs clients, c’est-à-dire pour l’économie nationale tout entière, pourvoyeurs de gains de productivité et de compétitivité considérables, car ils connectent tous les secteurs de l’économie aux innovations les plus récentes. Alors qu’il faut préparer la reprise, le rôle central des éditeurs de logiciel apparaît plus que jamais.
Bernard-Louis ROQUES, Directeur Général et co-fondateur de Truffle Capital
Éditorial - Nadia IDRISSI et Eric Beaudet
En avril 2020, quand nous avons réalisé notre enquête Truffle100, le pays était encore sous le choc d’un premier confinement sévère et aux prises avec une absence totale de visibilité. Ceci s’était ressenti dans les résultats alrs que les mots « crise » et « décroissance » ressortaient de tous nos entretiens. La COVID-19 a d’ailleurs entrainé un recul historique du PIB français (-8,3%) et le marché du SITS (Software IT Services) a baissé de 7,7% en 2020. Le secteur du logiciel a mieux résisté faisant -5,3%. Tandis que le sous-segment SaaS (Software as a Service) toujours très dynamique est en forte croissance (+15%), selon nos dernières estimations. Les éditeurs de logiciels de notre top-100 Truffle ont même affiché une croissance de leur chiffre d’affaires en 2020 de 4,3% grâce à la forte exposition du sous-segment du SaaS et à leur capacité à aller chercher de la croissance à l’international.
Ces chiffres montrent cependant une réalité complexe. En effet, le maché des services IT a fortement été impacté par la crise sanitaire, souffrant d’arrêts et de reports de nombreux projets de transformation et d’infogérance d’entreprises, notamment sur les secteurs aéronautique, manufacturier et des transports. La crise de 2020 a été plus violente que celle de 2009 avec 33% des entreprises qui ont vu leur chiffre d’affaires reculer en 2020 contre 30% en 2009. Pour ces dernières, les mesures gouvernementales ont pris tous leur sens et ont été plébiscitées par notre panel. Le plan de relance a été à la hauteur des attentes de 87% des éditeurs, 31% d’entre elles ayant eu recours au PGE (à hauteur de 9,3% de leur CA en moyenne) et 52% à une aide à l’emploi (chômage partiel, plan emploi jeune…).
La croissance du chiffre d’affaires des éditeurs du Truffle 100 montre que la crise sanitaire a aussi été un véritable accélérateur de digitalisation des entreprises avec la généralisation du télétravail et la modernisation des méthodes de production. Des sujets déjà à la mode comme le cloud, la cybersécurité et le « remote workplace » ont tiré le marché et permis à la majorité des éditeurs, généralement bien préparés, d’afficher des croissances de leur chiffre d’affaires grâce au dynamisme de leurs offres SaaS (87% en possèdent) et à l’accélération de l’internationalisation (63% des sociétés souhaitent augmenter leurs projets à l’international).
Dans ce contexte, les éditeurs de logiciels entament 2021 sur un vent d’optimisme : 98% d’entre elles tablent sur de la croissance et près de trois quarts d’entre elles comptent augmenter leurs effectifs cette année.
Nous observons, chez teknowlogy/CXP-PAC, que les entreprises utilisatrices de solutions logicielles accélèrent cette marche forcée vers des investissements de transformation digitale majeurs incluant Ies process industriels. Le plan de relance permettra de soutenir la reprise amorcée par les entreprises pour faire avancer les projets d’amélioration de leurs performances tant vis-à-vis des clients et des fournisseurs qu’en ce qui concerne les outils mis à disposition des collaborateurs.
Nadia IDRISSI, Présidente de teknowlogy | CXP-PAC
et
Eric Beaudet, Consultant /Analyste senior